30/08/21 par Françoise Morin Malcor Membre titulaire  du SNPPsy

Prendre le temps de trouver un sens à sa vie…
des clés pour vivre mieux

Beaucoup de réflexions émergent suite à la pandémie et à toutes ses conséquences néfastes. L’avantage d’une telle crise, c’est qu’elle peut nous donner l’occasion de nous interroger davantage sur le sens de la vie que nous menons chaque jour et d’utiliser des clés pour vivre mieux.

Trouver un sens à sa vie, une situation extrême mais éclairante

Pour illustrer, j’évoque ici les travaux de Viktor E. Frankl (1905-1997) et ce qu’il en a tiré pour aider ses patients dépressifs. Ce psychiatre viennois est un survivant des camps de concentration. Il avait deux objectifs, deux raisons de vivre : sa femme et ses travaux scientifiques. Il décrit son expérience dans son best-seller « Découvrir un sens à sa vie ». Sa vie dans les camps montre en effet que l’être humain est capable de s’élever au-dessus de n’importe quelle situation, même la plus insupportable.

Voici ce qu’il dit : « au lieu de se demander si la vie avait un sens, il fallait s’imaginer que c’était à nous de donner un sens à la vie, à chaque jour et à chaque heure, instant après instant »

Selon lui, on peut découvrir le sens de sa vie de trois façons différentes :

  1. En réalisant une œuvre ou une bonne action 

  2. En faisant l’expérience de l’amour ou de l’amitié 

  3. En assumant une souffrance inévitable.

Il dit aussi : «  si l’on met moins d’efforts sur ses conflits et que l’on pense davantage à ses buts, alors il se produit que l’on s’oublie soi-même et la vie dans son ensemble prend davantage de sens, même si la névrose ne disparaît pas complètement ».

Bien des patients qui me consultent connaissent des problèmes qui relèvent d’un mal-être existentiel, d’une perte de motivation avec des idées négatives, d’une fatigue intérieure.

Certains d’entre eux expriment une baisse d’estime d’eux-mêmes. Ainsi, il est clair que la confiance en soi est mise à mal et demande à être restaurée dans le travail psychothérapique.

La confiance en soi, un socle à consolider

La confiance en soi, c’est parfois ce saut dans le vide, ce risque de tomber, comme l’enfant qui se lance dans la marche, c’est un lâcher-prise qui va donner de l’espace, de l’autonomie, de la vie. Juste avant de franchir une étape nouvelle dans sa croissance, l’enfant régresse parce qu’il a peur de grandir : il s’accroche à sa mère, attire son attention pour demander aide et encouragements. Mais finalement l’élan de vie prend le dessus.

J’observe chez la plupart de mes patients qu’ils n’ont pas eu ce cadre sécurisant et valorisant dans leur enfance, et qu’ils viennent le chercher en séance. Il leur manque l’appui qui rassure et permet l’action.

C’est dans cette voie de la confiance que je les accompagne pour qu’ils découvrent peu à peu les ressources insoupçonnées qu’ils portent en eux et qui vont les remettre en route… en vie...

François Roustang, philosophe, hypnothérapeute, disait vers la fin de sa vie dans une interview à propos de son travail avec le patient : «  le plus important, c’est le moment où la personne s’éveille à elle-même ». 

Des clés pour vivre mieux

  • Accomplir les petits actes simples du quotidien et s’ouvrir aux autres

Je partage les conseils de bon sens du psychiatre Serge Héfez interviewé sur la santé mentale. S’adressant à ceux qui traversent une période difficile sur le plan psychologique, souvent intensifiée par la crise actuelle, il dit : « face à l’angoisse ambiante et à la perte de sens actuelle, il est fondamental, quand on cherche à sortir d’un état dépressif, de rétablir l’action avec des choses basiques de notre quotidien, de trouver son centre de gravité, d’être modeste en se donnant des tâches tous les jours, des objectifs à très court terme, et de sortir de soi en retissant des liens, en agissant pour les autres et en multipliant de simples gestes gratuits d’entraide ».

  • Oser être soi-même

    Une jeune patiente dresse en séance la liste de ses objectifs en ces termes : « relativiser mes maux avec le désir d’accomplir, d’apprendre, d’évoluer dans le sens de devenir bienveillante, meilleure envers moi-même et dans les relations humaines, goûter l’instant présent ».

    Cet autre patient est arrivé à une impasse avant de décider de consulter et, disait-il, « ne savait plus comment avancer, comment mettre son passé derrière ». Il était mal dans sa peau et continuait à avoir des pulsions suicidaires. Et voici ce qu’il me dit à la fin de notre travail : « je voyais bien que le fait de parler dans un espace de confiance, de pouvoir penser à haute voix en présence d’un tiers, m’avait permis de m’apaiser peu à peu avec une volonté de reconnexion avec moi-même, de détachement émotionnel, d’audace de vivre ». Je l’ai vu se relever d’un dur combat avec lui-même pour se trouver libre, avec ses propres désirs à lui pour mener sa vie. A la fin de la thérapie, nous avons conclu ensemble qu’il venait de réussir le « diplôme » du passage à la vie adulte.

  • Se connecter à son corps

Cette clé que j’utilise dans mon travail est la résolution des émotions par les sensations corporelles.*

Nous avons tous la capacité naturelle à résoudre nos émotions, mais nous avons pris l’habitude de nous adapter en les gérant avec notre mental pour qu’elles s’arrêtent ; or, elles reviennent. L’objectif de cet exercice est de mener la personne dans son corps, de l’ancrer dans le présent, car c’est là qu’elle va guérir et être libérée durablement d’inconforts émotionnels et de symptômes récurrents.

***

Trouver un sens à sa vie ? C’est d’abord se poser, et avancer positivement dans la connaissance de soi pour aller chercher ses désirs enfouis, les rendre réalisables peu à peu, mettre en lumière et développer ses talents et, encouragé par ses progrès, décider de vivre autrement. La séance de psychothérapie est un lieu privilégié pour activer et soutenir cette démarche.

*Mieux vivre par l’écoute sensorielle fera l’objet d’un prochain article