Le contexte de la psychothérapie relationnelle en 2021, se pose sur fond de crise sanitaire, avec une santé mentale de la population française qui s’est détériorée.

Les politiques ayant été interpellés, ils ont souhaité mettre en place des dispositifs d’aide pour la population, en favorisant l’accès à la consultation psychothérapique par-delà la prescription chimiothérapique classique dont la France est une grande consommatrice. Ils n’avaient été cependant pas attendus puisque de nombreuses organisations, dont la nôtre, avaient proposé des listes de praticiens susceptibles d’offrir une écoute bénévole dès les premières confrontations douloureuses, à l’expérience du confinement et à la détresse des personnels soignants.

Des séances sont remboursées pour les enfants et les adolescents, des séances prises en charge pour les étudiants, et 4 séances remboursées pour les adultes, à hauteur de soixante euros, par les mutuelles.

Des états généraux ont été organisés, après un rapport de l’Igas extrêmement sévère sur la formation universitaire des psychologues, qui demande une réorganisation de leur parcours de formation avec plus d’homogénéité dans les savoirs au fondement du diplôme.

Concurremment, l’idée de mettre en place un ordre des psychologues se précise en vue de permettre aux ministères d’avoir un « réel » partenaire de réflexion et d’échanges quant à la politique à mener pour les problématiques de santé mentale française.

Ces idées rencontrant des résistances, celles-ci sont dès lors contournées en accordant une fois de plus, une place prépondérante au pouvoir médical, se retrouvant prescripteur de séances de psychothérapie effectuées par les psychologues, voire les psychothérapeutes.

Mais en fait, si nous observons bien, tout ce qui se concrétise actuellement comme tendance et décisions politiques ne sont que l’incarnation de tout ce qui était déjà en gésine depuis des années, et déjà légalement mis en place dans d’autres pays, tels l’Italie, la Belgique. Des projets pilotes existaient dans différentes régions selon des accords entre autres, entre la caisse nationale d’assurance maladie et la fédération des thérapies cognitives et comportementales, la question d’un conseil de l’ordre des psychologues avait déjà été évoquée par certains psychologues eux-mêmes pour tenter de faire face à l’engouement par le public pour certaines pratiques psychothérapiques leur faisant concurrence.

Si maintenant, les pouvoirs publics sont acquis à la cause de la psychothérapie, de nombreuses études leur avaient déjà montré le coût moindre de la prise en charge psychothérapeutique par rapport aux soins médicamenteux1, le politique se voudrait apporter toutes les garanties du sérieux de la prise en charge, dont seuls les médecins et les psychologues témoigneraient, et ce d’autant mieux si l’on supprime tout ce qui est hors filière universitaire. Cela éviterait des formes de charlatanisme, et le facteur si dérangeant de l’Inconscient, résistant aux évaluations normatives qui vaudraient preuve d’un usage perspicace et prometteur du plan de la santé mentale tel qu’organisé en France.

Ainsi, des listes vont apparaître avec des psychologues qui se retrouvent à accepter de mener des consultations à quarante euros pour une première séance psychologique d’évaluation, via des questionnaires à remplir et les autres séances psychologiques à trente euros. Dix autres séances de psychothérapie peuvent être prescrites. Se profilent ainsi les psychothérapies « low cost » face à tous les professionnels qui se tiendront en dehors du dispositif afin de préserver la qualité et les moyens de leur exercice, ou qui de toute façon, demanderont un supplément d’honoraires à leurs patients, mais avec le risque d’être repris par le législateur, l’égalité d’accès aux soins n’étant plus assurée. Il est étrange que le législateur n’ait pas choisi l’option de renforcer l’offre des services publics ayant déjà une longue expérience de la pratique des soins, avec plus de possibilités d’embauche, de projets innovants et de formations adéquates tant attendues. Mais seulement un remboursement de soins relevant du privé, et dès lors en conséquence privilégiant les méthodes utilisées facilement évaluables, ne traitant que des symptômes pouvant disparaître assez aisément et accessibles pour un faible nombre de séances courtes, vu le faible taux de facturation, que ce soit pour le psychiatre ou le psychologue.

Pendant ce temps, nous notons un besoin accru de la population d’être réellement écoutée, entendue dans sa souffrance profonde et singulière, où les questions existentielles sont prédominantes, face à la mort que l’on croyait presque forclose, réapparaissant de façon ostentatoire et massive, et face à une saturation de communications concernant tous les domaines, générant une réelle crise de l’intelligence, aggravant la crise d’autorité déjà prégnante et empêchant une docte ignorance nécessaire pour préserver un peu de légèreté d’Être.

C’est donc plus que jamais que cette discipline de la psychothérapie relationnelle dont nous nous faisons les thuriféraires, doit être enseignée dans des écoles de qualité, transmise dans sa complexité et faire référence pour les professionnels de la santé mentale, et que tous les praticiens qui ne peuvent accoler le diplôme les autorisant à l’usage de la psychothérapie telles que les ARS le conçoivent, doivent pouvoir continuer à exercer librement mais non sans grand professionnalisme, rigueur conceptuelle et éthique, et références théoriques, méthodologiques, régulièrement renouvelées par l’intégration des nouvelles pistes de compréhension théorico-pratique.

D’autant plus que le marché de la psychothérapie se présente comme dérégulé, générant de nombreuses peurs chez les politiques et chez les usagers.

Notre syndicat a toujours, depuis le départ, comme nous l’ont rappelé nos fondateurs, eu vocation à organiser, rendre lisible et visible la qualité des praticiens de la psychothérapie relationnelle, dans un souci de responsabilité sociale et politique. C’est toujours la position que notre syndicat a défendue. Mais cependant, nous sommes confrontés, comme de nombreuses autres institutions, à une très faible implication des praticiens et des didacticiens de la psychothérapie relationnelle, malgré l’avenir précaire de la discipline et du métier de psychopraticien.

Pas que nous voulons être pessimistes, car nous savons la créativité à l’œuvre du sujet lorsqu’il est confronté à la rudesse de ses conditions d’existence, mais pour qu’elle puisse se déployer, il lui faut force, nombre et moyens, matériels, humains et moraux.

Comment analyser ce peu d’engagement et d’implication pour notre cause aujourd’hui ? ce qui ne signifie cependant pas un désintérêt car tous les jours, les demandes adressées à notre structure sont nombreuses et variées. Mais comme si les moyens nécessaires n’étaient plus pensés et ne faisaient plus corps avec les membres, réels ou potentiels.

Et dès lors, quel avenir, quelle orientation, sommes-nous autorisés à penser, avec si peu de moyens « humains », paradoxe d’une institution qui promeut la psychothérapie dite relationnelle !!! Alors que nous avons besoin d’être un contre poids conséquent et responsable face au risque de réduction de l’offre d’accompagnement psychothérapeutique de qualité pour les usagers.

Je vous remercie pour votre écoute.

QUELQUES ÉLÉMENTS DE NOTRE RÉFLEXION COLLECTIVE CE 18.11.2021

Si nous n’avions pas été fondé en 1981, que créerions-nous aujourd’hui ?

Sur ce fond de crise d’intelligence, la question de l’engagement doit être repensée.

Comment prendre place dans la société tout en maintenant notre exigence de l’excellence, porteuse de la pluralité de nos approches et de notre éthique ?

Par-delà nos commissions essentielles de titularisation de nos membres (Cnaat), de déontologie et de communication, il serait intéressant de réhabiliter la commission recherche et développement, afin de nourrir une réflexion et en favoriser sa profondeur. Celle qui autorise à penser ce changement paradigmatique concernant la nouvelle façon de penser le sujet et le collectif. Elle pourrait également mettre en évidence notre épistémologie, notre façon spécifique d’apprendre sur l’Humain.

Et comment intervenir auprès de la population régulièrement confrontée à des situations d’urgence, en apportant, à contre-courant, une proposition d’accompagnement qui réintroduit la question du temps, un temps beaucoup plus lent, dans une politique individualiste et néo-libérale ?

La structure institutionnelle, et notre syndicat en est une illustration, témoigne de ce qui peut faire violence dans sa dimension aporétique de tentative de conciliation du rythme singulier, lent, d’un sujet incarné, orienté par ses besoins et désirs en tant que membre et les exigences sociétales de plus en plus contraignantes, et immédiates, auxquelles toute organisation doit faire face.

Nous défendons une certaine conception de l’Humain, chaque école et chaque méthode portent explicitement mais le plus souvent implicitement, des fondements anthropologiques spécifiques qu’il conviendrait de mettre en exergue, il serait pertinent que notre Syndicat s’attache à cet aspect et en travaille ses formulations.

De belles perspectives pour nos prochaines années… Bonne fête au syndicat

par Myriam Goffard, présidente du SNPPsy de 2016 à 2017, Vice-Présidente, Psychothérapeute, psychanalyste, superviseure agréée, fondatrice de l’Analyse TriDimensionnelle.

myriam.goffard@espaceatd.fr

1 Nous l’avions déjà annoncé à une réunion d’antenne de Montpellier, il y a quelques années. Nous l’avions interprété comme une réussite paradoxale de notre promotion syndicale. Qu’allait devenir notre mission désormais, puisqu’elle était accomplie ? Et surtout, nous nous interrogions sur les futures décisions que prendrait le gouvernement à cet endroit.